Se mettre au travail
pour construire une entente et la paix entre les gens, pour un pays qui prend en compte tous ses habitants, contre les politiques de persécution.

Se mettre au travail, 
car on ne peut pas raisonnablement croire que les épisodes parlementaires, si mouvementés qu’ils puissent être, nous permettront de faire face à la situation.

1) La situation, tout le monde la connait et la dissolution de l’Assemblée Nationale ne fait qu’accélérer le processus en cours depuis les années Sarkozy. Avec les 88 députés RN et un Président de la République encore plus pétainiste que ne l’était Sarkozy, nous avons eu la politique la plus xénophobe et raciale depuis la fin de la 2° guerre mondiale et la collaboration. Déchéances de nationalité (ouvertes par Hollande), atteintes importantes au droit du sol, expulsions de personnes tout à fait en règle, loi cautionnant la « préférence nationale », refus d’asiles, doubles peines remises en place, refus de nationalité sur des motifs incompréhensibles, personnes qu’on laisse mourir aux frontières, traitement inhumain des migrants à Calais … : tout cela atteint des chiffres, et une réalité, jamais vus depuis la sinistre période historique de 1940.

Il ne sert pas à grand chose de s’interroger sur ce que seraient les raisons du vote RN. Les multiples études de sociologues et politistes pour chercher les motivations d’un tel vote (sentiment d’abandon, déclassement, ras le bol anti Macron etc) ne sont là que pour tenter de masquer, de se masquer, la réalité ou de la rendre moins dure : la raison principale du vote RN se fait sur un rejet, une haine, un refus de l’autre, le « différent », parce que basané, musulman, « faux français », rom ou autre. De toute façon, même si on est dans une situation difficile, ou humilié et rabaissé au quotidien, il n’y a jamais de bonnes raisons pour se rallier à la persécution, à la xénophobie et au racisme contre d’autres.
On peut d’ailleurs constater qu’au fur et à mesure que le RN réduit son programme social, cela ne lui fait pas perdre de voix. On peut parler d’effondrement moral et subjectif chez nombre de personnes.
Voilà où nous en sommes aujourd’hui en France.

  • Nous en sommes là par ce que depuis plus de 40 ans le « problème immigré » est devenu le plat qu’on nous ressert à chaque élection, transformé depuis 2015 en « problème musulman ». Les partis, les gouvernements, n’ont que ça à la bouche, et cela leur a évité d’avoir à travailler une pensée politique positive, un tant soit peu recherchée, fouillée, sur la situation du pays, du monde, et de la réalité de notre peuple de France.
  • Nous en sommes là aussi parce qu’il y a un grand silence de beaucoup de gens face à cette xénophobie, face à ces lois qui s’empilent, ces persécutions qui se mettent en place à coups d’ordonnances, décrets administratifs, opérations policières …
  • Nous en sommes là car les politiques de séparation des gens dans le pays n’ont pas été combattues : séparation entre ceux « des quartiers » et ceux d’ailleurs, séparation entre les musulmans et les autres, séparation entre les chômeurs, les personnes au RSA, les handicapés, tous ceux que Les Macron, Le Pen, Bardella et tant d’autres appellent « les assistés » et les autres, ceux qui ont encore la possibilité de « se lever tôt pour aller travailler dur » et qui seraient «empêchés de vivre comme une vraie classe moyenne. ». Le point essentiel aujourd’hui, sur lequel s’appuie tout l’édifice Lepenien/Macronien, ce sont les politiques de séparation des gens, de mise en concurrence à l’infini.

Nous en sommes aussi là parce que gouverner ainsi, sans aucun principe et en refusant tous dialogue, discussion, négociation… pour passer en force a ses limites. La situation créée en Nouvelle Calédonie en est un des derniers exemples frappant et dramatique : envoyer la police et l’armée pour soutenir de manière éhontée les groupes ultra de caldoches, emprisonner dans la métropole les opposants politiques (vieille pratique coloniale) en présentant cela comme une réponse politique à une situation complexe, alors qu’en vérité cela casse toute les avancées réelles construites ces dernières 30 années, montrent bien cette arrogance et ce vide.

En reprenant de plus en plus les thèmes du RN que sont le sécuritaire et l’identitaire xénophobe, et en les faisant siens, les gouvernements Macron se sont enferrés dans une incapacité à comprendre quoi que ce soit à ce qui est véritablement en jeu dans les différentes situations actuelles.
Quand  on s’imagine que le sécuritaire et l’identitaire xénophobe vont tenir lieu de toute pensée, il n’y a alors plus de prise possible sur le réel et plus de rapport positif possible à sa transformation. Il y a obligatoirement repli, violence, mépris, antagonisme. C’est ce à quoi nous avons assisté ces dernières années, et c’est ce qui permet au RN d’être en position de force.
Si crise politique il y a, c’est une crise due au fait que le sécuritaire, l’identitaire xénophobe et la guerre menée contre les gens tiennent lieu de toute pensée politique, et que le rôle de l’Etat est réduit à gérer cela. Il n’y a plus de prise en compte de l’intérêt général, ni de l’ensemble de la population, mais au contraire une politique de séparation qui ne tient que par des tensions très fortes à l’encontre de la population et aboutit à une division profonde du pays : c’est ce que nous vivons depuis les années Sarkozy et son discours de Grenoble.
Cela est à prendre malheureusement comme une donnée qui va durer, quelles que soient les péripéties électorales, parlementaires et gouvernementales. 
Cette dissolution arrive aussi comme tentative de la part de Macron de provoquer le pire afin de masquer son propre échec.

2) Penser pour tous, en incluant toutes les personnes qui vivent dans le pays, énoncer et faire vivre des principes pour tous, c’est la seule façon de combattre la séparation entre les gens organisée par le gouvernement et de nombreux partis politiques.

  • Une chose est sûre : quel que soit le résultat des élections législatives, la situation structurée par le racisme et l’identitaire xénophobe ne disparaitra pas et perdurera avec un RN aussi fort, et ses idées aussi répandues. On ne peut donc pas se projeter dans les élections, qu’on aille voter ou non, comme une finalité à soi seule.
    On peut affirmer que pour qu’il y ait des avancées réelles et positives du côté des gens, porteuses de principes pour un pays pour tous et pour le respect de chaque habitant tel qu’il est, il est nécessaire que des pensées et des prises de position actives existent et soient indépendantes de l’Etat et du champ parlementaire. Ceci afin de s’extraire et de se mettre à distance des jeux politiciens, faits de places, compromissions, corruption, ivresse du pouvoir et autres avatars bien connus. 
    Au lieu de regarder le pouvoir, les puissants, il faut regarder du côté des gens, du côté de notre propre capacité à penser et à agir, et la renforcer.
  • On sait aujourd’hui que faire tomber son oppresseur ne suffit pas pour se libérer ; il faut passer de l’antagonisme à l’affirmation. Travaillons plutot à la constitution, pas à pas et de façon solide, sur des points précis, dans des lieux précis, (quartiers, villages, entreprises, facs, lycées…) à une capacité à faire face solidairement, à créer du lien, du commun, dans la durée et dans les troubles qui s’annoncent.

Travailler à une entente entre des gens différents, mais qui vivent dans le même pays, travaillent dans les mêmes entreprises, étudient dans les mêmes lieux, est ce à quoi il faut s’atteler afin d’élaborer ensemble les principes et les batailles à mener pour que chacun soit respecté, compté, et considéré dignement tel qu’il est. La rupture d’avec le Lepénisme Macronien se joue en grande partie là.
C’est la possibilité de porter une idée positive et neuve sur le pays, sur ses habitants, tous ses habitants, considérés à égalité.

Ce travail est encore possible, il est entre les mains de chacun.e, il se joue dans la décision de chacun. Il peut nous faire avancer pour définir ce que peut être une politique d’aujourd’hui, pour aujourd’hui, pour une pensée/action du côté des gens. 
Discutons en, réunissons nous.

L’équipe du Journal des possibles
28 Juin 2024

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