Ces notes sont issues de discussions en réunions, et en dehors, où nous avons travaillé à partir du point suivant : la situation Palestine/Israël et ce qu’on peut en dire pour ici, pour une politique du côté des gens.
1) Le gouvernement israélien fonde sa politique sur un nationalisme exacerbé, religieux, raciste et xénophobe. Il faut reconnaître qu’il pratique depuis des années l’une des pires politiques coloniales qui soit, insupportable, qui persécute les Palestiniens et par ailleurs corrompt la société toute entière (ce qui avait fait réagir cette même société israélienne au travers de grandes manifestations de masse avant la tuerie du 07/10).
Pour le gouvernement israélien, la vie des palestiniens compte pour zéro, certains politiciens leur déniant même la qualité d’êtres humains. Les bombardements incessants de civils, d’hôpitaux, d’écoles…, le développement des colonies en Cisjordanie et les exactions des colons sous la protection de l’armée israélienne, tout cela participe d’une volonté d’extermination de la part du gouvernement. Une telle politique, une telle pensée, ne peut mener qu’au désastre.
2) Il est évident que ni le gouvernement Israélien ni le Hamas ne veulent résoudre politiquement le conflit : ils en vivent, le conflit leur permet de justifier leur présence, leur place, et de se rendre indispensables.
La politique du Hamas se calque sur la politique israélienne, elle vient en miroir de la politique fasciste du gouvernement Néthanyaou : tenir si peu compte du déchaînement de violence évident et prévisible du gouvernement israélien en réponse aux crimes de masse perpétrés le 7/10 montre le peu de cas que fait le Hamas des Gazaouis, de leur vie, de leur avenir.
Il suffit de voir les programmes des uns et des autres : « Un Etat Juif de la Mer au Jourdain », versus « Un Etat Arabe et Musulman de la Mer au Jourdain ».
Nous pouvons tirer un premier enseignement des 2 points précédents : toute politique qui se fonde sur des bases xénophobes, ethniques ou religieuses est à terme une politique criminelle, qu’elle soit gouvernementale ou non.
3) La fin de l’apartheid en Afrique du Sud a aussi mis fin à la conception strictement antagoniste dans les luttes de libération nationale : la seule issue n’est plus le « eux ou nous », mais bien plutôt, avec la mise en place de la commission « de la vérité et de la réconciliation », une réflexion et une pratique nouvelles sur comment les gens différents qui vivent sur un même territoire et qui sont tous légitimes à y rester construisent ensemble un Etat, un régime et un pays nouveaux. Ce n’est pas pour l’instant la voie choisie par le Hamas ni par le gouvernement israélien. Par contre de nombreuses voix existent, côté palestinien comme israélien, qui même minoritaires, portent l’idée d’un Etat bi-national, d’un pays pour tous ceux qui sont sur le territoire, un pays sans apartheid ni séparation.
4) Le piège identitaire.
On peut se reconnaître d’une histoire, d’une religion, d’un pays etc… et cela participe de notre identité personnelle. L’identitaire, c’est autre chose. Quand nous parlons de politique identitaire, nous parlons de politiques qui se fondent sur une seule identité (qu’elle soit religieuse, raciale, nationaliste ou autre) contre les autres.
Dans beaucoup d’endroits dans le monde ce piège identitaire est en place et des politiques gouvernementales, ou non, travaillent à l’idée qu’il ne pourrait pas y avoir d’entente possible entre des gens différents de par leur couleur, religion, nationalité… , et cherchent à enfermer et à réduire les habitants de leur pays dans une catégorie prédéfinie par leur naissance, leur religion, leur couleur de peau.
Avec une pensée et une politique identitaires, il ne peut y avoir que divisions, conflits, guerres, donc exclusion et persécution de certain-e-s. L’’identitaire, c’est le « eux ou nous » comme proposition politique criminelle.
5) Ici aussi nous sommes face à un tel défi, avec un gouvernement Macron/Darmanin en pointe avec notamment la « loi immigration » en préparation, mais aussi toutes les mesures déjà existantes au nom de l’anti-terrorisme et du « séparatisme ».
Cette « loi immigration » prévoit par exemple de retirer les papiers à des habitants du pays sur simple décision Préfectorale, elle prévoit de durcir le regroupement familial, de faciliter les expulsions y compris de mineurs ou de personnes vivant ici depuis de nombreuses années ; elle prévoit de durcir le droit du sol etc… Elle poursuit les tentatives de Hollande de déchéance de nationalité.
Cette proposition de loi s’accompagne d’un véritable déchainement xénophobe, anti-musulman, anti-africains, qui fit ressurgir le thème nauséabond du « vrai français » contre les « français de papiers », notion qui tente de remplacer le statut juridique de la nationalité, par une logique raciale du français ! Du déjà vu sous Pétain et les nazis. Et qu’on ne s’y trompe pas, quand ce genre de discours se répand, l’anti-sémitisme n’est jamais loin.
Tout cela crée une division entre les gens et laisse l’initiative aux politiques gouvernementales les plus réactionnaires contre les droits et le respect de chacun. Des individus s’en emparent et se sentent légitimes à enquêter, soupçonner leurs collègues ou voisins. Déjà des amis sont questionnés de façon intrusive sur leur lieu de travail : « Tu es musulman ? Tu vas à la mosquée ? Tu fais la prière ? », comme s’ils devaient se justifier, rendre des comptes, comme s’ils étaient soudain devenus différents et dangereux.
En dernier ressort, ce que nous devrons à Macron, c’est le retour du « vrai et du faux français » et des milices fascistes dans la rue.
6) « Ne pas baisser les bras, une vie = une vie ».
Voilà une affirmation faite par un ami en réunion et qui peut s’adresser à chacun, chacune dans la situation actuelle.
De quoi s’agit-il ? D’énoncer, de porter ses propres principes et valeurs car il y a à formuler autre chose que « eux ou nous », de tous contre tous, et de la guerre ou du contrôle policier comme politique. Les choses se jouent aujourd’hui autour du point suivant : mettre sa propre subjectivité face à une autre subjectivité, dire ce que l’on a à dire, faire ce que l’on a à faire. C’est dans ce sens là qu’il faut entendre « ne pas baisser les bras ».
Ne pas baisser les bras, c’est aussi refuser la simplification à outrance portée par l’identitaire et refuser de catégoriser les gens.
Et il faut au contraire mener le débat, et intervenir dans les situations pour soutenir la capacité de celles et ceux qui veulent travailler ensemble à une entente commune et à des solutions permettant à chacun et chacune de vivre à égalité dans ce pays.
C’est ce que nous essayons de faire, et c’est là aussi de l’ordre de la décision de chacun.e.
Des personnes différentes réunies en
décembre 2023
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